Il est essentiel, à mon sens, de défendre les librairies de proximité…

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Géraldine Bannier
Députée de la Mayenne
Membre de la Commission des Affaires culturelles et de l’Éducation
Présidente du Groupe d’Études Livre,
Économie du Livre, Économie du Papier 

 

Comment passe-t-on de professeur, à Maire, puis députée ?

Je suis agrégée de Lettres, alors que je suis issue d’une famille d’agriculteurs et d’éleveurs de chevaux. Je n’étais ni conseillère, ni adjointe, mais adhérente au MODEM depuis 2007 et je voulais m’impliquer dans la vie associative, jusqu’à un coup de théâtre : il y avait une femme maire qui avait fait deux mandats, la première année, puis on est venu me chercher pour être maire de mon village de Courbeveille de 670 habitants. Ce fut une expérience tout à fait passionnante.

Je suis née et j’ai vécu en Mayenne. J’ai été élue par des Mayennais. Cela a du sens pour moi ! J’ai battu l’ancien député LR, Guillaume Chevrollier, qui est désormais Sénateur. Je suis donc, vous l’aurez compris, issue de la ruralité et je trouve indispensable d’avoir au sein du Parlement des personnes de terrain qui peuvent parler de la fracture territoriale. Dès lors, je veux donner une image positive de la ruralité, de ma commune où existe une véritable solidarité, ainsi que du département de la Mayenne qui est celui où l’on vit le plus longtemps en France !

À dire vrai, je ne connaissais pas le fonctionnement de l’Assemblée, mais on s’adapte et on en comprend vite les rouages.

Quels enseignements tirez-vous de votre expérience de professeur ?

J’ai été professeur au collège, de la 6ème à la 3ème. Si les équipements numériques sont de bons outils, tous les élèves ne possèdent pas encore de tablettes. La feuille et le crayon restent donc des équipements incontournables. Mais au-delà, la complémentarité avec le papier reste, à mes yeux, essentielle. D’un point de vue sociétal, nous butons sur le problème de savoir si nous devons nous diriger vers une société tout écran, toute la journée, avec les conséquences médicales qui les accompagnent. La modernité offre de nombreux avantages et nous ne pouvons pas l’occulter, mais tout est une question d’équilibre.

Il s’agit cependant en premier lieu de développer les compétences à la lecture et son apprentissage pour que les élèves puissent utiliser l’informatique à bon escient.
Si les enfants sont confrontés trop jeunes aux écrans, ils ne développeront pas les mêmes capacités neurologiques. Il est prouvé, de plus, que nous mémorisons mieux sur papier. Enfin, alors que même en politique, les longs discours ne captent plus vraiment l’attention, il semblerait que certains, notamment au niveau local, ne l’aient pas encore compris…

Vous êtes membre de la Commission de la Culture et de l’Éducation… Quels sujets souhaiteriez-vous voir appréhender ?

Nous sommes en train de travailler sur la loi sur l’audiovisuel avec la remise à plat de la redevance, mais aussi sur la problématique de la taxation des GAFA et sur la distribution des droits d’auteur. Et en cela, l’agriculture et la culture rencontrent les mêmes problématiques, dans la mesure où c’est celui qui produit la matière première – que ce soit du lait ou une œuvre artistique – qui est le moins bien rémunéré.
Cela doit changer !

Les citoyens sont d’ailleurs de plus en plus attachés à la transparence dans tous les domaines et à la répartition des valeurs. Nous regardons aussi le secteur de la presse. De plus en plus de groupes privés n’hésitent pas à y inverstir, à l’image de Renault, qui est entré à hauteur de 40 % dans le Groupe Challenge. Les lecteurs-papier diminuent et, dans ce contexte, on peut se demander comment la presse peut-elle réussir à garder son indépendance. Nous avons, certes, besoin d’investisseurs privés, mais un certain nombre de cadres sont, indiscutablement, à redéfinir. Nous en sommes donc à l’état de réflexion, mais c’est en tout cas une question que je me pose.

Quelle est la situation culturelle de votre circonscription ?

En Mayenne, les librairies sont assez présentes. Nous sommes une terre littéraire, rappelons-le ! Il reste des librairies particulièrement dynamiques à Laval et à Château-Gonthier. Mais cela est lié à l’éducation, en Mayenne comme dans le Grand Ouest en général, où les taux de réussite au Bac sont importants. Il existe véritablement une tradition de lecture, dans tous les milieux sociaux de l’Ouest. Nous sommes aussi des lecteurs de presse, avec une forte présence de Ouest France.

Quel regard portez-vous sur ces quelques mois de législature ?

Le fonctionnement de l’Assemblée est trop archaïque. Nous sommes actuellement trop dans les discours et la recherche de visibilité vis-à-vis de l’extérieur, au détriment de l’action. Aussi, qu’en est-il de l’efficacité ? Je fais partie de ces nouveaux députés qui trouvent que le modus operandi de l’Assemblée est à revoir, mais ce n’est pas simple ! Nous sommes issus du terrain et nous avons l’habitude d’agir et d’être efficace. Plutôt que de poser des questions pendant des heures à un Ministre, ne vaudrait-il pas mieux se rendre précisément sur le terrain, travailler sur un sujet, rencontrer les acteurs pour faire remonter les idées ?

Un mot sur votre nouveau rôle de Présidente du Groupe d’études sur le « Livre, Économie du Livre, Économie du Papier » ?

Je découvre aussi ces enjeux et notre rôle sera de se rendre sur place, rencontrer des professionnels, faire des auditions, mais également étudier quelles sont les problématiques et les réponses à apporter.

Enfin, il est essentiel, à mon sens, de défendre les librairies de proximité, car elles font vivre les centres villes. Nous pouvons, en outre, établir des partenariats avec des associations comme « Lire et faire lire » pour pouvoir disposer de plus d’ouvrages disponibles. C’est un enjeu qui s’inscrit bien au-delà de la culture…

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